
Dans une interview exclusive donnée au Parisien le 14 juin, Agnès Buzyn, nouvelle ministre des Solidarités et de la Santé affiche ses priorités, lutte contre les déserts médicaux, prévention, et dossier de l'obligation vaccinale chez l’enfant.
Aujourd'hui, seuls trois vaccins infantiles sont obligatoires (diphtérie, tétanos, et polio), huit autres, dont la coqueluche, l'hépatite B, la rougeole, étant seulement recommandés. Pour Agnès Buzyn, ce double système est une exception française et pose un vrai problème de santé publique. Aujourd'hui, en France, la rougeole réapparaît et dix enfants sont décédés depuis 2008. Comme ce vaccin est seulement recommandé et non obligatoire, le taux de couverture est de 75 % alors qu'il devrait être de 95 % pour prévenir cette épidémie. Le même problème se pose avec la méningite et face à ce constat la ministre réfléchit à rendre obligatoires les onze vaccins* pour une durée limitée, qui pourrait être de cinq à dix ans, ce qu’a fait l’Italie la semaine précédente.
Consciente que beaucoup de français soient opposés à une politique large de vaccination, Agnès Buzyn y trouve là un paradoxe « D'un côté, les Français veulent un vaccin dès qu'un virus apparaît, comme Ebola ou Zika. De l'autre, ils sont méfiants face aux existants… On ne retient que des effets secondaires, dont beaucoup n'ont pas été prouvés… Il faut vraiment faire œuvre de pédagogie. La vaccination, ce n'est pas seulement l'intérêt qu'on y trouve soi-même, c'est un enjeu de solidarité, une façon de protéger l'ensemble de la société ».
A la question de savoir s’il faut passer par l’obligation, Agnès Buzyn oppose l’urgence de la situation évoquant la quinzaine d’enfants hospitalisés à cause de la rougeole. Quant à servir l’intérêt de l’industrie pharmaceutique, la ministre répond clairement qu’on ne peut pas réduire la question de la vaccination à l'intérêt des laboratoires même si ceux-ci gagnent de l’argent.
Enfin, sur une éventuelle obligation de la vaccination antigrippale dès la saison prochaine Agnès Buzyn dit se poser quotidiennement la question pour les professionnels de santé qui en ne s’immunisant pas font courir un risque à leurs patients. Une discussion doit s’organiser sur ce point avec l'ordre des médecins et des pharmaciens.
* Polio, tétanos, diphtérie, coqueluche, rougeole, oreillons, rubéole, hépatite B, bactérie Haemophilus influenzae, pneumocoque, méningocoque C.
Source : Le Parisien 16/06/2017